2yrs-stock-price_solocalSolocal, important groupe de services de publicité sur Internet, issu de la reprise avec endettement de Pages Jaunes à France Telecom, est depuis la fin 2015 la victime d’exactions directement associées à l’origine très contestable de ce type d’opérations dites de LBO ou « leveraged buy-out », manœuvres qui semblent désormais pleinement assumées par son Directeur Général, Jean-Pierre Remy.

De quelles exactions Jean-Pierre Remy se rend-il à nos yeux coupable ?

Précisons que cet homme n’est pourtant pas un financier. C’est au contraire un spécialiste d’Internet, dynamique et courtois, à priori l’homme qu’il fallait pour transformer la filiales des années de France Télécom en un opérateur souple et expert de publicité sur Internet et de suivi de cette fameuse clientèle locale. Et la plupart des observateurs reconnaissent que, pour l’essentiel, J.P.Remy aurait réussi ce pari difficile.

Apres l’opération antérieure, abusive mais considérée aujourd’hui légale, qui a consisté à vider les caisses du groupe pour payer les actionnaires  Goldman Sachs et KKR à l’origine de ce LBO, J.P.Remy a dû, en 2014,  pour équilibrer la structure et ramener la société vers des eaux profitables, demander plusieurs centaines de millions à ses actionnaires et en particulier à ses salariés et anciens salariés. Cette opération les a faut souscrire à des actions au cours de 15 euros en moyenne, les créanciers du groupe ne concédant eux alors qu’un mince report de deux ans des échéances.

Sur cette base assainie, J.P.Remy poursuivait la transformation avec le projet de se débarrasser dès que possible du 1,2 milliard de dette obérant la capacité d’action du groupe redevenu rentable. Un ralentissement généralisé du secteur Internet en 2015 suffit sans doute à assombrir les perspectives et l’idée malsaine fut alors soufflée au dirigeant de passer les actionnaires actuels par pertes et profit pour enrichir quelques vautours.

Une telle opération d’expropriation des actionnaires au bénéfice de certains créanciers supposait une sérieuse baisse de l’action : d’où l’indignation des actionnaires minoritaires remontés contre une communication alarmiste de la société, générant de l’incertitude sur les résultats par le provisionnement inattendu de 35 millions d’euros sur un contentieux social pour partie classé, et par la dépréciation brutale et peu justifiée pour la bagatelle de 1,6  milliard d’euros de la principale filiale dans les comptes de 2015. Ajoutez à ceci un report d’assemblée générale incompréhensible et l’annonce d’un plan de refinancement au contour très incertain sans suspension de cours…

En quelques mois, le cours est alors passé des alentours de 15 euros à 2,425€ aujourd’hui. Seul espoir dans la tourmente,  la formidable mobilisation des quelques 1200 porteurs indignés rassemblés en quelques mois par l’association Regroupementpplocal.

Courant août 2016 est enfin publié un plan qui ne fait, hélas, que confirmer l’existence d’un complot des créanciers ayant pris la société en otage et visant à se réserver une fois de plus la meilleure part aux dépens des actionnaires fidèles.

J.P.Remy offre aux actionnaires actuels donc à tout nouveau venu à bas prix de souscrire pour 400 millions à un euro par action : certes le fameux droit préférentiel de souscription ou «  dps » des actionnaires est bien là, mais à un prix honteusement bas, destiné à sacrifier les anciens actionnaires au profit des derniers arrivés.  La parfaite logique court-termiste des développeurs de Monaco!  Du passé faisons table rase, « mort aux vaincus qui m’ont écouté en 2014 »,  « vae victis !»…

En diluant d’autant plus les plus anciens actionnaires pour ensuite offrir une conversion avantageuse en actions aux créanciers, conversion agrémentée de bons de souscription à bas prix. (Cf convocation de l’assemblée du  19 octobre 2016 à 17 heures, au Dock Pullman, 87 avenue des Magasins Généraux, 93 300 Aubervilliers)

En bref, J.P. Rémy et son conseil, sous l’influence de conseillers peu scrupuleux, proposent ici l’inverse de la démarche saine qui porte le dirigeant à respecter tous ses actionnaires et à veiller à ce que le marché valorise correctement l’entreprise.

La dernière journée des investisseurs confirmait ces craintes. Les actionnaires regroupés de l’association regroupementpplocal en furent intentionnellement exclus. Cerise sur le gâteau, J.P.Remy, qui avait pourtant été aimablement reçu par les dirigeants de Regroupentpplocal au printemps et ne pouvait les ignorer, fulmine l’anathème  et menace directement les dirigeants et les membres de Regroupementppsolocal : “Cette association d’activistes prédateurs s’arrange avec la réalité de SoLocal et se complaît dans des accusations mensongères et calomnieuses”  Il va falloir nous expliquer lesquelles…. Selon lui la société se limite à une mise en demeure mais envisage une action en justice contre l’association qui s’est, légitimement à nos yeux, inquiétée auprès de l’AMF des manœuvres de Solocal. Rappelons lui  que selon la Cour de Cass. com. 5-7-2016 n°14-23.904 FS-D :  ” A commis une faute grave le directeur général d’une société anonyme qui s’est rendu coupable d’actes déloyaux contraires aux intérêts de la société et de l’actionnaire et à son contrat de mandat. “

En bref, au lieu de jouer franc jeu avec ses anciens actionnaires et respecter leur investissement de 2014 réalisé au cours de 15 euros à sa demande et à celle des créanciers , J.P.Remy lève le voile et assume sa trahison. Ce sont les actionnaires minoritaires qui sont qualifiés par le management d’ »activistes prédateurs »  alors que ceux-ci estiment que la recapitalisation est faîte au rabais, que l’entreprise vaut plus et qu’il faut négocier plus âprement les abandons de créance avec les créanciers… Pour la première fois des actionnaires demandent à être associés dans la négociation d’une restructuration financière afin d’être partie intégrante de la solution sans se faire passivement tondre.

Notons que ces menaces de dirigeants aux actionnaires sont la nouvelle mode. C’est la seconde fois en un an,  après l’affaire des menaces de Vivendi toujours impunie par l’AMF,  que Proxinvest observe les menaces publiques d’un émetteur visant à intimider les actionnaires qui critiquent sa gestion. Toujours hélas sans aucune sanction du Régulateur sur les propos mensongers d’un émetteur.

Il temps pour le Régulateur de sanctionner plus sérieusement les manipulations de marché et autres informations mensongères d’où qu’elles viennent, et d’enfin cesser de ne donner raison qu’aux banquiers de place stipendiés par les dirigeants sans scrupule : il n’y a évidemment aucun mérite, aucune valeur ajoutée pour une société à augmenter son capital à un prix de casse, aucune commission à devoir reconnaître à ce type de banquier conseil.

Gageons que l’assemblée générale des actionnaires de Solocal saura rappeler que l’actionnaire ancien, celui que l’on prétend favoriser avec un droit de vote double, ne saurait faire les frais de l’incurie d’un dirigeant que nous voulions croire plus impuissant que malhonnête

Septembre 2016


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