GECINA : Alteco et MAG Import, sociétés d’investissement espagnoles, actionnaires majoritaires à 31% au capital de Gecina ont déposé le bilan … une occasion de revenir sur cette belle valeur dont l’histoire témoigne de la trop grande vulnérabilité de nos sociétés cotées.

Dès l’assemblée générale de GECINA du 22 avril 2008 Proxinvest recommandait de s’opposer au vote du rapport spécial des conventions réglementées en raison notamment d’une avance de 10M€ à Bami Newco dans le cadre de l’acquisition d’un terrain situé à Madrid, une opération intéressant le PDG Jocquin Rivero et qui paraissait mal documentée.

A la même assemblée de 2008 entrent au conseil pour trois ans quatorze nouveaux administrateurs dont huit postes pour des représentants des acquéreurs espagnols le groupe Metrovacessa (26,8%), et les familles Soler (16,1%) et Rivero (15,3%) deux postes pour Predica (MM. Hocher et Duchamp), et quatre administrateurs « indépendants » dont MM. Aldo Cardoso et Philippe Geslin (ex-directeur d’Indosuez Crédit-Agricole).

Cette année, lors de la dernière assemblée générale, GECINA, sur une question de la présidente de l’ADAM, Madame Colette Neuville, reconnaissait que son ancien PDG Joaquín Rivero avait été intéressé à des opérations de l’ordre de 350 M€ ayant exigé le provisionnement de 206 millions.

Comme actionnaire l’ADAM avait heureusement dès 2009 porté plainte contre X pour abus de bien social , le PDG de Gecina ayant engagé la société dans diverses opérations en Espagne pour plus de 400 M€. Parmi ces opérations de Joaquin Rivero l’acquisition en 2009 pour 109 millions d’euros de 49% de Bami, foncière de bureaux espagnole qui lui appartient ainsi qu’à son partenaire au capital de Gecina, Bautista Soler, un actif qui valut a Gecina une dépréciation de 77% dès la fin 2009 puis de 100% au 30 juin 2010. Vinrent ensuite l’acquisition de titres Eiffage, le prêt consenti à Bamolo pour l’achat d’un terrain non constructible et non cadastré pour 60M€ et la prise de participation dans la société Sanyres.

Dès l’assemblée de 2009 le décor est posé : Proxinvest continue de s’opposer vigoureusement aux conventions réglementées et l’ADAM demande la révocation des administrateurs bénéficiaires Joaquin Rivero et Antonio Truan. La révocation obtiendra un score de 4%, une majorité des administrateurs soutenant encore Joaquin Rivero ; elle atteindra un score plus remarquable de 20% en 2010.

Le 16 février 2010 le conseil nomme Bernard Michel, directeur général de Predica, la bancassurance du Crédit Agricole, comme président de la société , se porte partie civile aux cotés de l’ADAM en avril 2010 Mais il faut attendre deux ans pour obtenir début 2012, suite à la dissimulation de 10 M€ de garanties données, le départ de l’ex PDG indélicat, Joaquin Rivero, qui demeurait Directeur Général soutenu par les administrateurs majoritaires.

Comment expliquer ce retard alors que la société a dû passer 600M€ de provisions en 2011 et vu fondre à la moitié des résultats attendus à fin 2011 ?

La première raison peut-être bancaire : le Crédit Agricole est le banquier en Espagne des groupes actionnaires : même si son entrée au capital via Predica ne doit rien à son activité de prêteur, l’intérêt du groupe bancaire est sans doute le maintien in bonis de clients endettés. La présidente de l’ADAM, Colette Neuville, considère que l’endettement des actionnaires est un grave problème dans ce dossier comme dans celui de Lagardère, Pages Jaunes, Carrefour, Belvédère. Elle demande que les informations sur l’endettement des grands actionnaires et l’éventuel nantissement des titres soit communiqué aux sociétés et à leurs actionnaires avec le nom des banques bénéficiaires .

La seconde raison est sans doute la paralysie d’un conseil majoritairement acquis aux trois actionnaires espagnols totalisant 56% des actions. Le Président Bernard Michel, indique à l’assemblée générale de 2012 que « la répartition des sièges reflète la répartition du capital. Metrovacesa, le groupe Soler et le groupe Rivero, qui détiennent respectivement 26,8%, 16,1% et 15,3% du capital social, sont représentés respectivement par quatre, deux et deux administrateurs au Conseil d’Administration soit huit sur quatorze ». Mais si les règle du jeu en matière de transactions liées ne sont pas appliquées l’actionnaire contrôle peut librement piller la société sur la base du soutien d’une majorité des administrateurs. La majorité d’administrateurs indépendants ne devrait-elle pas être exigée dans tous les conseils comme le demandent le FRC et le FSA britanniques?

La troisième raison est évidemment la complaisance individuelle d’administrateurs indépendants face aux intéressés, rappelons que les administrateurs votent sans les intéressés lorsque les conventions passent en conseil.

Il conviendra de rappeler en son temps que le comité d’audit de 2008 était présidé par Monsieur Philippe Geslin, et comptait Messieurs Patrick Arrosteguy, Jose Gracia Barba, Jean-Yves Hocher et Emilio Zurrutuza,.comme membres, qu’un Comité de coordination « saisi des projets d’investissements sortant du cadre des activités courantes de la société » et « faisant le point sur les améliorations possibles dans le fonctionnement du Conseil d’Administration » comptait comme membres outre Philippe Geslin, MM Serafin Gonzales Morcillo et Aldo Cardoso lesquels se sont aussi tous retrouvés dans un Comité ad hoc créé en juillet 2008 pour « étudier une prise de participation éventuelle ». Tous ces travaux valurent à leurs auteurs des jetons de présence pour 2008 totalisant 220 450 € pour Philippe Geslin, 170 00€ pour Patrick Arrosteguy, 127 000 pour Serafin Gonzales Morcillo 115 00€ pour Jean-Yves Hocher, 104 000 € pour Aldo Cardoso.

Quatrième piste : les commissaires aux comptes, Price Waterhouse (Eric Bull, titulaire, Pierre Coll suppléant) et Mazard, (Guy Isimat-Mirin, titulaire, Patrick de Cambourg, suppléant), ont-ils eux bien fait leur travail ? Pour partie puisque certaines des opérations étaient portées au rapport spécial, visiblement pas toutes, puisque certaines garanties bancaires ont été dissimulées aux administrateurs et sans doute au conseil et aux commissaires. Non, à l’évidence puisque certaines conventions liées décelables et dénoncées par les salariés à l’ADAM (cf. note ci-dessous) n’ont pas été portées au rapport spécial, et que, même si Proxinvest à recommandé de s’opposer, la plupart des actionnaires votant ont accepté la résolution.

Ce sont les mêmes commissaires aux comptes qui ont aussi, semble-il, laissé participer les intéressés au vote en assemblée générale au mépris de la loi, puisque, chez Gecina, la base de calcul des résolutions est la même pour le vote du rapport spécial que pour les autres résolutions.

Enfin, cinquième et dernière raison de cette dégradation, et non la moindre, est à trouver chez les actionnaires minoritaires, qui représentent 40% du capital, puisque Madame Victoria Soler et la société Metrovacesa, administrateurs associés depuis le début aux opérations douteuses des deux actionnaires espagnols, ont été réélus très largement à 95 et 96% en ce printemps 2012.

PROXINVEST 3 Octobre 2012

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