Ira M. Millstein est  une conscience patronale de la gouvernance américaine. Cet avocat d’affaire très expérimenté a mérité le respect des investisseurs américains comme de ses clients, comme GM et GE.  Le journaliste Geoff Colvin de Fortune Magazine l’interroge  à l’occasion de la parution de son dernier livre, The Activist Director: Lessons from the Boardroom and the Future of the Corporation.

Ses propos à la faculté de droit de Columbia expriment de fortes inquiétudes sur l’avenir de l’économie américaine sous l’imprévisible président Trump et soulignent l’importance d’avoir des administrateurs très engagés dans les conseils d’administration et auprès des dirigeants. Selon lui, les dirigeants sont perdus face aux incertitudes nouvelles et on besoin de partenaires au conseil, administrateurs connaisseurs du secteur d’abord puis des administrateurs qui apprennent à connaître leur groupe.

Selon Geoff Colvin il est vrai que vingt ans après Enron et deux couches de régulations Sarbanes Oxley et Dodd Frank les administrateurs actifs et stimulants semblent rares dans les conseils américains.  Selon Ira Millstein, la raison de ce conformisme des administrateurs est que les grandes banques, sauvées par les Etats, se sont trouvées rassurées et beaucoup moins intéressées par une bonne gouvernance, la crise a été  contenue et le temps a été pris par la conformité. Les phénomènes de grégarisme sont soulignés par Millstein et l’envahissement des media par le court-termisme allié à une grande absence de contestation ou de contre-pouvoirs dans le monde financier.

La première chose que j’ai du apprendre aux administrateurs de GM en crise aura été de leur faire connaître leur pouvoir : ils fallait les convaincre dans les années 1980 que les voitures japonaises étaient meilleures que les américaines, or le président de l’époque ne donnait à ses administrateurs que des informations très partielles sur la situation concurrentielle.  Il raconte avec saveur les première réunions du conseil de GM sans son président. John Smale son successeur, venu de Proctre & Gamble, voulut tout savoir et brisa tous les tabous, et créa les fondement de la bonne gouvernance à l’américaine: indépendance des administrateurs , administrateur référent, executive sessions…

Si les administrateurs ignoraient alors, pour la plupart, leurs pouvoirs vis à vis du Directeur général, ils savent aujourd’hui qu’ils peuvent et devront  même parfois congédier le directeur général  : mais ce sont les administrateurs engagés sur le long terme aux côtés du Directeur général qui manquent aujourd’hui, pour se préoccuper intensément de croissance et d’innovation et prendre à bras le corps  la responsabilité de l’organisation interne, de la stratégie et de l’efficacité.

Ceci impose que les administrateurs soient très ouvert sur le monde. et l’activisme actionnarial est là et très utile pour secouer le cocotier et placer de meilleurs administrateurs au conseil s’il s’agit de créer de la valeur. La réalité est que les institutionnels parlent d’activisme mais n’en font pas. Les activistes n’ont d’ailleurs pas toujours raison mais il faut d’abord les écouter.

Paris, le 11 mai 2017

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