Qu’une société mette en place des conditions de performance peu exigeantes pour ses plans d’actions gratuites, ce n’est, malheureusement,  pas étonnant dans le paysage français où certains émetteurs cherchent à cocher les cases du code AFEP-MEDEF (présence de condition de performance) tout en essayant de s’en garantir l’attribution d’une grande partie. En revanche, qu’une société décide de ne pas appliquer les conditions de performance prédéfinies, c’est du  jamais vu.

Chez GFI Informatique, l’un des leaders européens de services informatiques, le cas du plan d’actions gratuites de mars 2013 est assez parlant et illustre parfaitement le décalage entre ce qu’annonce une société et sa pratique effective.

Le 1er mars 2013, 870 950 actions gratuites sont attribuées aux managers et aux salariés du Groupe. Ces actions étaient attribuées sous conditions que la marge opérationnelle au 31 décembre 2013 soit de 6,4% pour la tranche 1 et de 6,6% pour la tranche 2.

Or, pour cet exercice 2013, la marge opérationnelle n’a été que de 6,1%. Ces actions gratuites n’auraient donc dû ne pas être acquises puisque les objectifs minimaux de performance les conditionnant n’ont pas été atteints.

Mais c’était sans compter le Conseil d’administration (ne comprenant que 37,5% de membres qualifiés d’indépendant à l’époque selon la définition Proxinvest) qui, le 4 mars 2014, constatant que les objectifs n’avaient pas été atteints, les a purement et simplement modifiés et a alors « considéré que les critères de performance ajustés avaient été atteints » pour les 2 tranches.

La société ne daigne d’ailleurs pas préciser aux actionnaires quels ajustements ont été effectués.

La société invoque seulement pour 2013 des « circonstances économiques exceptionnelles notamment dans la zone ibérique » pour se justifier. Il est vrai qu’en 2013, en termes de marges opérationnelles, la situation n’était pas brillante chez GFI, mais cette situation n’était pas propre à la « zone ibérique », les marges opérationnelles de toutes les zones géographiques du groupe étaient en baisse, à l’exception de la France. Ainsi les actionnaires ont été impactés par cet épiphénomène ibérique, mais les dirigeants de devraient pas l’être ? Une bien curieuse politique d’alignement des intérêts des actionnaires et des dirigeants.

On notera que 86,86% des actions gratuites attribuées l’auront été au profit des  « managers du groupe », au premier chef le Président Directeur Général, Vincent Rouaix, qui aura donc finalement bénéficié  de l’attribution de ses 150 000 actions gratuites ( soit tout de même  17% de l’attribution totale) alors même que la condition de performance initiale n’était pas remplie, un pur cadeau pour le PDG d’une valeur de 928 500 € au cours à la date d’attribution (1er mars 2015).

Par ailleurs, la mesure sur un seul exercice de la performance est court-termiste et loin de satisfaire la politique de vote de Proxinvest qui recommande une mesure de la performance sur cinq ans et dans tous les cas jamais inférieure à trois années afin de s’assurer que les actions gratuites rémunèrent une performance réelle de long terme.

Autant d’éléments qui incitent Proxinvest à recommander aux actionnaires de s’opposer au nouveau plan d’actions gratuites envisagé par la société à travers la résolution 1 de l’assemblée générale extraordinaire du 18 novembre 2015 sur laquelle Proxinvest vient de diffuser son analyse. Proxinvest note que les nouvelles conditions de performance ne sont toujours pas communiquées aux actionnaires avant leur prise de décision et que l’autorisation porte sur une émission de 1,82% du capital.

Ceci est d’autant plus regrettable que la performance de GFI Informatique a été excellente sur moyen terme et qu’un bon management n’a pas à craindre d’aligner sa rémunération sur sa performance à moyen-long terme…

Rappelons que le slogan de GFI Informatique est « New Challenges, New Ideas » ;  à quand les « New Practices » ?

 

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