Proxinvest a participé à l’assemblée générale du groupe Casino le mardi 7 mai 2019 à la maison de la Chimie, constatant une fois encore le score stalinien (99,36%) obtenu par le dividende, un sujet sur lequel les actionnaires semblent aveuglement suivre les recommandations de vote du management.

Le dividende est la juste rémunération du risque élevé pris par les investisseurs en capital mais les investisseurs responsables doivent aussi se pencher sur ce sujet afin d’en évaluer la soutenabilité et les conséquences sur le long terme. Chez Casino, depuis 2015 Proxinvest juge ce niveau de dividende élevé, risqué et irresponsable.

En effet, le dividende proposée s’élève toujours à 3,12 € par action, inchangée depuis des années

Pour l’exercice, les comptes consolidés sont déficitaires à hauteur de 54 M€. Selon la politique de vote de Proxinvest, la distribution d’un dividende au titre d’un exercice déficitaire en comptes consolidés n’est en général pas souhaitable.

La distribution représente aussi 5,13% des fonds propres du groupe et 8,3% de la capitalisation boursière

.
Le dividende total représente 111% des free cash flow du groupe (Cash Flow From Operations – Capex) ce qui n’est pas conforme à nos recommandations. Il n’est donc pas couvert par le cash net après investissement et semble dès lors excessif. En effet les flux de trésorerie générés par l’activité sont de 1 141M€ alors que les investissements (CAPEX) sont de 1 185 M€. La volonté de versement de ce dividende annuel de 342 M€ ne peut donc être financé que par un risque d’endettement plus élevé ou par des cessions d’actifs, la société ayant plutôt fait le choix de mettre en oeuvre d’importants plans de cessions d’actifs. Certes, l’endettement net a ainsi diminué de 17% en 2018 et est moins significatif (gearing de 0,51 et dette consolidée nette équivalente à 2,29 années de flux de trésorerie opérationnels) mais les cessions auront rogné la base d’actifs du groupe pour le futur alors que le dividende aurait dû servir d’amortisseur.

Ainsi, Proxinvest constate que la vente des activités asiatiques Big C thailand et Vietnam a rogné de 9% le chiffre d’affaires consolidé et de 18% le résultat opérationnel. De même, une grande partie des cessions d’actifs concernent des opérations de Sales & lease back, par exemple la cession des Murs Monoprix ou sur 2019 l’opération avec Fortress. Ceci a pour conséquence une augmentation des engagements de loyers immobiliers et mobiliers qui passent de 3 022 M€ à 3 605 M€.

En effet, comme chaque année, le maintien du dividende à 3,12 € proposé permet surtout à l’actionnaire de contrôle d’honorer sa dette financière, problématique que l’on retrouve à presque chaque étage de la cascade de holdings de Jean-Charles Naouri (à noter qu’une grande proporition des actions Casino détenues par son premier actionnaire sont nanties au profit de banques). Dès 2015, Proxinvest a émis des doutes sur la soutenabilité du dividende de Casino et, dès 2016, Proxinvest recommandait de s’opposer, dénonçant ,

« un montant de dividende qui « permet surtout à l’actionnaire de contrôle d’honorer sa dette financière (problématique que l’on retrouve à presque chaque étage de la cascade de holding de Jean-Charles Naouri) « 

et concluant qu’

« il est totalement incohérent de verser un dividende alors que les comptes consolidés présentent une perte et que le groupe est forcé de se désendetter massivement. Ce dividende ne semble pas dans l’intérêt social de Casino mais sert l’unique intérêt de l’actionnaire de contrôle qui en a besoin. »

Alors que la notation financière des emprunts obligataires par Standard & Poors et par Moody’s a été dégradé en septembre 2018 respectivement en BB perspective négative et en Ba1 perspective négative, ces dégradations ont continué début 2019, nos réserves historiques demeurent et Proxinvest ne pouvait pas recommander d’approuver ce dividende.

Certes, tous les actionnaires ne sont pas obligés de partager ce point de vue, c’est ce qu’il y a de beau dans la démocratie actionnariale. Toutefois, observer un score stalinien sur le dividende du groupe est de nature à s’interroger sur le manque d’analyse contrariante sur les sujets financiers traités en assemblée générale, au premier chef la question du dividende. Le groupe Casino a encore beaucoup de défis à relever devant lui et il est dommage que la politique de dividende n’ait pas joué son rôle d’amortisseur dans cette période compliquée.


Les études de Proxinvest sont disponibles par abonnement sur ses sites clients ou en achat à l’unité sur ResearchPool :
https://www.researchpool.com/provider/proxinvest/co-casino-assemble-gnrale-des-actionnaires-du-07-mai-2019

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