La saison 2017 des assemblées générales d’actionnaires est exceptionnelle à plusieurs titres :  année record en termes de résolutions rejetées et d’activisme actionnarial, première année du vote contraignant sur les politiques de rémunération des dirigeants et dilution en droits de vote des actionnaires minoritaires du fait de la multiplication des droits de vote double.

  • Record du nombre de résolutions rejetées

Depuis sa création en 1995, jamais Proxinvest n’avait observé autant de résolutions rejetées dans les assemblées générales françaises. Sur les 352 assemblées générales analysées par Proxinvest, 85 résolutions auront été rejetées (+52%). Plus d’une société sur dix aura vécu ce désaveu de leurs actionnaires. En 2017, 56% de ces résolutions rejetées portent sur les autorisations d’augmentations de capital (risque de dilution et risque de protection du management en période d’offre publique), pour 19% sur la rémunération des dirigeants) et pour 8% sur des conventions avec des parties liées.

  • Le mécanisme du droit de vote double, une atteinte à la démocratie actionnariale

28 résolutions supplémentaires n’auraient par ailleurs pas été approuvées si les actionnaires de référence ne bénéficiaient pas de droit de vote double (48 en 2016, 21 en 2015, 32 en 2014). En 2017, les actionnaires minoritaires de 14 sociétés du SBF 120 auront subi une dilution moyenne de 22% en droits de vote du fait de l’instauration de ce droit de vote double par la Loi Florange. Exception française, le droit de vote double est loin de récompenser la fidélité,  il demeure un mécanisme protectionniste, réservé aux seuls actionnaires au nominatif, qui permet à un actionnaire important de contrôler une assemblée générale au détriment des actionnaires minoritaires. Proxinvest propose de le supprimer afin de rétablir une proportionnalité entre le niveau d’investissement et le droit de vote en assemblée générale.

 

  • 2017 : la contestation des actionnaires aux assemblées générales françaises reste forte

Proxinvest aura alerté ses clients investisseurs sur 43% des 6 867 résolutions proposées au vote. Le score d’opposition moyen des actionnaires atteint 5,43% en 2017 contre 5,5% en 2016, les sociétés françaises faisant l’objet d’une contestation plus élevée que la moyenne européenne qui se situe à 3% des votes (source : Expert Corporate Governance Service – ECGS). Ce sont surtout les actionnaires des grandes sociétés cotées composant le CAC 40 qui se montrent plus contestataires en s’opposant à 6,5% des résolutions en 2017 contre 5,1% en 2016. Le taux de contestation moyen monte même à 9,8% lorsque l’on observe le comportement des seuls actionnaires minoritaires.

Les types de résolutions les plus contestées en 2017 sont les dispositifs anti-OPA et les rémunérations des dirigeants.

 

  • Année record pour l’activisme actionnarial

Le tome 2 du rapport de Proxinvest observe une montée de l’activisme actionnarial en France et revient sur huit situations d’activisme. Jamais Proxinvest n’avait observé autant de résolutions externes déposées (73). Les actionnaires individuels de Solocal se seront montrés particulièrement actifs, déposant un total de 56 résolutions externes au cours de trois assemblées générales différentes, dénonçant la spoliation au profit de fonds spécialisés sur la dette spéculative, obtenant une renégociation favorable des conditions financières d’un plan de restructuration financière préalablement annoncé comme non négociable, rejetant un plan de rémunération en actions gratuites pour 6% du capital et obtenant un rafraichissement salutaire des principaux mandataires sociaux. Phitrust Active Investors a pour sa part obtenu un soutien massif des actionnaires minoritaires d’Accor sur sa résolution proposant de supprimer le droit de vote double (52% d’approbation).

Proxinvest soutient la proposition de l’AMF de diviser par deux les seuils de détention requis pour déposer des résolutions externes en assemblée générale.

 

  • Introduire un vote de l’assemblée générale sur les acquisitions significatives

En contestant à juste titre le prix d’acquisition de Zodiac par Safran trop élevé et l’absence d’approbation de l’assemblée générale, l’activisme du fond britannique TCI a finalement contribué à obtenir une économie de plus d’un milliard d’euros pour Safran. 

En sus de ce débat sur la nécessité d’un vote sur l’acquisition de Zodiac par Safran, l’année 2017 a aussi été marquée par l’acquisition de Christian Dior Couture par LVMH et par l’acquisition d’Havas par Vivendi, deux acquisitions bénéficiant à d’importants actionnaires. Proxinvest réclame l’importation dans le système législatif français de la règle LR11.1 du Premium Listing du London Stock Exchange afin d’octroyer à l’assemblée générale un droit de contrôle via un vote contraignant sur toute acquisition significative, sans participation au vote des actionnaires intéressés à la transaction.

 

  • Première année du vote contraignant sur les politiques de rémunération (art. 161, Loi Sapin 2)

La Loi Sapin 2 introduisait en 2017 son premier volet sur le vote contraignant des actionnaires sur la politique de rémunération des dirigeants pour l’année à venir. Aucun rejet de politique de rémunération n’aura été observé bien que les politiques de rémunération des PDG d’Atos et de Renault aient failli être légitimement rejetées avec des scores d’approbation très faibles à 53% et 54% seulement. Les politiques de rémunération des dirigeants ne font pas l’unanimité au sein de la communauté des actionnaires. Proxinvest aura alerté ses clients dans 62% des cas et dans les sociétés du SBF 120, 78 politiques de rémunération auront été contestées par plus de 20% des actionnaires minoritaires, 8 sociétés n’obtenant même la majorité des voix que grâce à l’actionnaire de contrôle (SFR, Ipsen, Bic, JC Decaux, Dassault Aviation, Iliad, Plastic Omnium et Dassault Systèmes). Les actionnaires attendent en général des montants raisonnables, de la transparence, un alignement avec la performance de long terme et une réactivité du conseil d’administration suite à une contestation. En 2018, l’approbation de l’assemblée générale sera requise non seulement sur la politique mais aussi sur les montants, condition préalable à l’attribution et au versement de rémunérations variables ou exceptionnelles. 

 

  • Améliorer le vote par Internet pour augmenter le taux de participation

Le taux de participation augmente fortement en 2017, passant de 68,94% des actions en 2016 à 73,55% en 2017. La marge de progression est encore grande puisque ce ne sont en fait que 56% des voix des actionnaires minoritaires qui sont exercées. L’exercice du droit de vote en assemblée générale reste un exercice compliqué administrativement pour beaucoup d’actionnaires individuels et étrangers, il reste par ailleurs beaucoup trop coûteux pour les investisseurs professionnels. Une meilleure démocratie actionnariale passera donc par la gratuité de l’exercice du droit de vote, une digitalisation des services bancaires et par une amélioration du vote par Internet tel que préconisé par le rapport « Pour un vote transparent et effectif en assemblée générale à l’ère du numérique » de la commission consultative « Épargnants » de l’AMF.

 

Amendements à la politique de vote de Proxinvest pour les assemblées générales 2018

 

En matière d’élections d’administrateurs :

  • L’incompatibilité des positions de concurrents et de consultants pour l’entreprise avec la position d’administrateur est entérinée.
  • La performance financière (création de valeur actionnariale) et la performance en matière de réduction de l’intensité des émissions de carbone seront intégrées à l’analyse du bilan du Directeur Général lors de son renouvellement au conseil d’administration.
  • Un Président Directeur Général fondateur sera désormais soutenu s’il veille à ne pas bénéficier d’avantages au détriment des autres actionnaires.
  • Dans les sociétés contrôlées, les actionnaires détenant moins de 10% des droits de vote seront qualifiés de membres libres d’intérêt au regard de la diversité apportée et de leur rôle de contre-pouvoirs.
  • Analyse des candidats au conseil d’administration sur la base de leur profession de foi, d’une politique de vote ou d’engagements sur des progrès conformes aux principes défendus par Proxinvest.

 

En matière de rémunération :

  • Proxinvest s’opposera au renouvellement du mandat d’administrateur d’un Président de comité de rémunération qui n’aurait pas apporté d’amélioration adéquate suite à une contestation de la rémunération par plus de 20% des voix des actionnaires.
  • Incitation à l’investissement de 50% du jeton de présence en actions de l’entreprisepar les administrateurs, à conserver jusqu’à la fin de mandat.
  • Simplifier les régimes de retraite supplémentaires, dits « retraites chapeau » en les limitant à des rentes totales maximales de 450 000€ par an, régimes obligatoires inclus.
  • Proxinvest recommande aux banques d’adopter le fully-loaded capital requirementcomme critère de performance des rémunérations variables mesurant les objectifs de solvabilité, tel que recommandé par la BCE.
  • Proxinvest recommande aux sociétés industrielles, sociétés du secteur extractif et sociétés du transport d’inclure la réduction de l’empreinte carbone comme critère de performance des rémunérations.
  • Proxinvest recommande aux investisseurs, administrateurs et dirigeants de réfléchir à une simplification et à une révolution des politiques de rémunération des dirigeantsqui mettraient fin au court-termisme actuel.

La structure de rémunération idéale recommandée par Proxinvest ne comporte qu’une rémunération fixe et une rémunération de long terme sous la forme d’actions gratuites obtenues après satisfaction de conditions de performance à cinq ans et soumise à une conservation supplémentaire de la moitié des actions pouvant aller jusqu’à cinq ans, même après le départ de l’entreprise.

 

Les objectifs recherchés sont :

  • de mettre fin à la prédominance des bonus annuels ;
  • de laisser le temps aux risques et aux investissements de se concrétiser et de se refléter sur la situation de l’entreprise.

 


Proxinvest est une société indépendante de conseil aux investisseurs institutionnels spécialisée dans l’analyse des résolutions présentées aux assemblées générales des sociétés cotées et dans les sujets de gouvernance. Le rapport Proxinvest comprend 450 pages. Le tome 1 du rapport étudie tout d’abord la participation aux assemblées générales, la contestation, l’analyse détaillée des résultats de vote des différents types de résolution et présente une analyse transversale des résolutions de type Sapin II. Le tome 2 revient sur huit situations d’activisme actionnarial, analyse les résolutions externes déposées par les actionnaires et salariés et présente les principes et la politique de vote de Proxinvest pour 2018. Il reprend en annexe l’ensemble des résolutions contestées à plus de 20%.

 

Les rapports de Proxinvest sont commercialisés par la Librairie LDEL/JUSTICIA et peuvent désormais être commandés en ligne : http://proxinvest.ldel.fr/  –  Tel : 01.48.56.89.89 ou librairie.justicia@gmail.com

 

Contacts :   Jehanne Leroy, Responsable de l’étude (jleroy@proxinvest.fr)

Loïc Dessaint, Directeur Général (ldessaint@proxinvest.fr)

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