L’extraordinaire maîtrise de son groupe par Vincent Bolloré s’est trouvée confortée lors de l’assemblée générale de Vivendi ce 25 avril  par l’adoption  de l’ensemble des résolutions, notamment grâce au droit de vote double et suite aux menaces très contestables prononcées en 2015 par Vivendi à l’encontre des actionnaires étrangers…

Magicien du langage,  grand industriel et grand financier,  Bolloré ne cesse de faire la preuve de son talent. Il ambitionne aussi de réussir ce auquel Jean-Marie Messier avait échoué:  la convergence des contenus et des contenants, l’alliance de la création et des média, créer un groupe français de rayonnement mondial au côté des plus grands américains, tout ceci dans un opportunisme financier troublant mais efficace.

Le problème est que Vincent Bolloré n’aime pas s’appliquer à lui-même les réglés de bonne gouvernance.

Et ce sont même ses pairs, les grands patrons, qui le lui reprochent. Créé en 2013, sous la pression du gouvernement pour éteindre le feu des  rémunérations abusive, le Medef et l’Afep rédigent une nouvelle version du « Code de gouvernement des sociétés cotées », et créent le Haut Conseil du Gouvernement d’Entreprise (HCGE) chargé de faire appliquer ledit code et d’admonester en privé les contrevenants.  Selon le site Les Jours, qui aurait bénéficié d’une indiscrétion,  le président du HCGE Denis Ranque, aurait porté contre Vincent Bolloré, président d’un conseil de surveillance chez Vivendi,  le grief explicite d’immixtion dans la gestion de Vivendi : « Vous intervenez plus comme dirigeant exécutif qu’en tant que président du conseil de surveillance chargé selon la loi de superviser mais non d’assumer la gestion de la société et de son groupe. » Nul n’a besoin de voir Bolloré en assemblée générale pour savoir qui a l’étoile du shérif, qui est le patron opérationnel qui appelle nommément les animateurs des diverses filiales a raconter chacun son tour la belle histoire de Vivendi.

Les actionnaires minoritaires de Vivendi ont en fait fortement sanctionné ce dirigeant cumulant de nombreuses directions de groupes cotés et qui se représentait pour 4 ans au conseil de surveillance : son score n’a été que de 82,12% et il n’eut été que 62 à 66% sans l’artifice du droit de vote double.

Plus nettement, ce sont les rémunérations des membres du Directoire soumise à la main de fer de ce dirigeant autoritaire, qui ont fait les frais de cette critique. La rémunération du président du Directoire, Arnaud de Puyfontaine , soit 3,5 M€ pour 2016  a été jugée excessive et n’a pas atteint 75% des voix tout comme celles des MM. Hervé Philippe (2,4 M€)   et Stéphane Roussel (2,7 M€). Au fond,  la contribution essentielle de ces membres du Directoire ne serait-elle pas d’accepter l’immixtion constance dans la gestion du Directoire par le président du Conseil de Surveillance ?

 

 Sans le droit de vote double Vivendi ne pourrait plus augmenter son capital.

Il y a deux ans le groupe Bolloré détenait 10,20% du capital de Vivendi soit 138 976 805 actions.

Le jour  de l’assemblée générale du 25 avril le groupe Bolloré détenait au moins 20,65% du capital (257 689 013 actions sur  les 1 247 888 683 actions ayant le droit de vote) et, grâce au droit de vote double  40,6%  des 975 610 998 voix exprimées de l’assemblée générale ordinaire (quorum de 62,09% en actions et 66,84% en droit de vote).

Plusieurs résolutions sont passées avec moins de 75% des voix exprimées, soit moins de 731 708 248 voix et ne seraient donc passées qu’avec 60 % des voix sans les 138 976 805  droits de vote double du Groupe Bolloré. Elles seraient apparemment presque toutes passées, même sans le vote présumée de soutien  général des 200 727 450 droits de vote double dont les 15 millions de droit de vote double du plan des salariés . La résolution 14 nommant Yannick Bolloré n’a rassemblé que 697 709 447 voix soit seulement 71,52% des voix: même  sans le soutien  du total des 200 millions de droits de vote double  son score « nu » aurait finalement largement dépassé les 387 441 774 voix nécessaires au seuil de 50% des voix exprimées.

Mais la résolution financière extraordinaire d’augmentation du capital avec DPS pour 750 M.€ , résolution n°21,  adoptée à  70,1 % (691 382 945 voix) avec le soutien de Proxinvest, n’aurait, elle, sans doute pas été adoptée car sans le droit de vote double elle n’aurait pas atteint les 516 537 373 actions requises pour atteindre le seuil de 66,7% des actions.

Quoique cette résolution, certes très ambitieuse,  ne semblait pas poser de problème, Proxinvest consière que droit de vote double demeure un trucage protectionniste bien regrettable.

 

26 avril 2017

 

 

Print Friendly, PDF & Email