Après son grave problème avec son premier actionnaire hostile Wendel, qui comptait bien sur le droit de vote double pour régner sur le groupe en ayant déboursé moins que requis, le groupe Saint Gobain aura reproduit avec Sika les mêmes errements de technocrate méprisant les collectivités de clients de salariés ou d’actionnaires. Une histoire déjà évoquée sur ce site et qui ne fait pas honneur à Saint Gobain.

Sika, comme beaucoup d’autres sociétés suisses, croyait se protéger avec des statuts iniques réservant le pouvoir par le biais de droits de vote inégaux à un actionnaire agréé par le conseil d’administration la famille Burckard qui se voyait reconnu 52% ses droits de vote avec seulement 16% des actions… Saint Gobain à donc promis à cette famille, et seulement promis, d’acquérir pour 2.75 milliards de francs suisses la holding de contrôle sous réserve de se voir reconnu ce contrôle majoritaire inique,  ce que conteste le management de Sika soutenu par une  brillante équipe de minoritaires autour de notre partenaire et actionnaire, Ethos,  la Fondation Bill & Melinda Gates, Fidelity et Threadneedle  qui se retrouvaient tous pris au piège de ces statuts qui ne protègent que le management et l’actionnaire de contrôle. Notons ici que le management de Sika fait bonne figure face à Saint Gobain qu’il sur-performe brillamment depuis deux ans.

De procédure en procédure devant les tribunaux suisses, Saint Gobain prétend se voir reconnaître ce contrôle inique admis par les statuts de Sika tandis que ses adversaires, managers et actionnaires minoritaires de Sika,  vouent le groupe français aux gémonies. Au prix proposé, Saint Gobain ne gagnerait en effet, via le dividende annuel attendu, que 1% du prix ainsi payé pour cette trahison des minoritaires de Sika : si Saint Gobain persiste dans son projet de prise de contrôle de cette société avec seulement 16% des actions  pour l’ «extraction » abusives de prétendues  synergies, il faudra décapiter le management de Sika et violer les principes élémentaires de respect des minoritaires pour jamais réussir à faire produire l’investissement réalisé. Gageons que Pierre-André de Chalendar n’est tout de même pas assez fou pour aller jusque là…mais il est assez cynique pour croire gagner à ce jeu malsain.

Cette affaire est une leçon importante pour nos régulateurs et pour les grands investisseurs trop complaisants pris au piège de leur propre laxisme sur les droits de vote double et le contrôle des conventions prétendument réglementées.

Bravo,  au passage, à la Fondation Bill & Melinda Gates d’avoir assigné Urs Burckard, le chef de la fratrie, pour manquement à son devoir de loyauté comme administrateur de Sika :…il n’est que trop rare de voir les investisseurs demander des comptes aux administrateurs complice des détournements.

Proxinvest a toujours été hostile aux droit de vote double et  s’alarme depuis quelques années du non-respect des procédures de contrôle des opérations avec les parties liées.  Rappelons le, la stratégie de Saint Gobain dans cette affaire n’est ni soutenable ni acceptable puisqu’elle repose sur un détournement abusif des synergies attendues, et de plus en plus improbables, de cette opération.

L’offre faite par le groupe français aux cinq enfants gâtés Burckard expirait le 30 juin 2016, date reportée depuis à 2017 et reportable à 2018… Mais, sauf à ce que ces derniers acceptent sagement de partager avec les autres actionnaires l’indécence prime de contrôle proposée,  il n’y a pas, pour Proxinvest, de rapprochement raisonnable. Saint Gobain pourra se consoler avec le gain de change attendu sur la couverture en franc suisses de cette acquisition bien mal inspirée.

Il restera aux actionnaires mobilisés autour de notre partenaire Ethos, la Fondation Bill & Melinda Gates,  Threadneedle, à poursuivre avec Proxinvest l’engagement contre de droit de vote double et pour un plus sérieux contrôle international des conventions réglementées.

PARIS le 29 mars 2016

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