La SFAF nous indique, via les Echos du 2 mars 2016, que 50% des valeurs petites et moyenne ne donnent lieu à aucune couvertures d’analystes financiers : seules 395 valeurs françaises seraient régulièrement suivies, ce qui ferait ironiquement de Proxinvest le premier analyste de la place de Paris.

On comprend la fragilité des valeurs cotées à Paris, mais est-ce une excuse pour les dirigeants de SOLOCAL ?

512 porteurs individuels de Solocal (anciennement Pages Jaunes) se sont regroupés face à la chute trop explicable du cours de bourse de cette société qui a atteint 3,50 euros fin février au plus bas d’une descente aux enfers qui dure depuis plusieurs années. Elle fait suite au rachat en LBO de cette filiale de France Telecom par les financiers regroupés autour du célèbre fonds américain KKR pour plusieurs milliards d’euros. Proxinvest avait acheté en 2005 à 18,82 € avant regroupement soit à 564 € ce titre se traitait à 3,60€ à fin février 2016 !

Ces repreneurs, sûrs du caractère récurrent des affaires de Pages Jaunes, avaient à l’époque transféré, une fois de plus abusivement et au mépris des petits porteurs, la dette abyssale qu’ils avaient contracté pour le rachat à la société cotée aux dépens des minoritaires. La méthode crapuleuse encouragée par certaines banques, méthode qui fait des dégâts et que les régulateurs n’ont jamais su ou voulu empêcher. Leurs ambitions malsaines se sont alors heurtées aux difficultés d’adaptation de ce groupe face à Internet, et finalement tous les actionnaires ont pris la perte résultant de médiocres valeurs de management et des intérêts abusifs consentis aux banques.

Ces dernières années, partant d’une position nationale forte, la société, renommée Solocal, était toutefois parvenu à redresser son modèle stratégique, à conquérir dans l’internet sa place de grand acteur de la publicité locale et, finalement au prix d’une augmentation de capital au cours ajusté de 15 euros, le plus bas du prix historique, à retrouver un cash-flow positif et même des bénéfices. L’échéance prochaine en 2017 du plus gros du reste de la dette soit 1,2 milliards ne posait plus de problème, mais, cette échéance offrait sans doute une tentation pour certains rapaces…

Le mépris des actionnaires semble hélas toujours à l’œuvre chez Solocal dont la très médiocre communication financière a littéralement cassé le cours de bourse en 2015. Comme si certains souhaitaient se garder le privilège de comprendre cette société désormais rentable.
Plus de 300 porteurs menés par l’ancien Directeur Général Euris et de EEM, Baudoin de Pimodan, viennent donc d’écrire la lettre ci-dessous au conseil d’administration de Solocal Group, son Président Robert de Metz et son Directeur général Jean-Pierre Rémy.

Proxinvest a, de même, écrit au Président Robert de Metz pour mettre en question la communication de Solocal: « la mention sybilline de négociations de la dette couplée à des résultats qui ont été détériorés par une provision qui semble excessive pour complément de plan social, ont jeté le discrédit sur un titre mal défendu par la Direction Générale. »
Une fois de plus l’AMF a dû être interpellée sur cette trop fréquente mauvaise méthode des dirigeants quant à l’intégrité de leur discours au marché.Il existe pourtant des textes contre la manipulation de marché par information trompeuse.

Que fait la police ?

Paris, le 1 er mars 2016

 

Lettre de Baudoin de Pimodan aux administrateurs de Solocal Group, son Président Robert de Metz et son Directeur général Jean-Pierre Rémy.

 

Monsieur l’Administrateur,

Vous avez été désigné par l’Assemblée générale des actionnaires à la fois pour veiller à la bonne gestion de la société, au respect des règles de droit et exercer votre mandat avec sérieux et loyauté.
Notre société a procédé en mars 2014 à une opération de restructuration de sa dette par le biais d’une augmentation de capital sur la base d’un prix de souscription équivalent à 15 euros après regroupement.
Motivés par les informations données par la Direction sur les perspectives qui s’offraient à Solocal à travers l’achèvement du plan d’évolution vers le digital, nombre d’actionnaires historiques, bien qu’ayant perdu jusqu’à 99% de leur mise initiale pour certains, vous ont fait confiance en souscrivant à cette augmentation de capital ; confiance largement partagée par le marché puisque de nouveaux investisseurs individuels les ont rejoints.
Les termes du communiqué publié à l’issue de cette augmentation de capital, le 4 juin 2014, et sans aucun doute avalisé par le conseil d’administration auquel vous siégez, étaient les suivants : « Notre augmentation de capital est un vrai succès et nous tenons à remercier pour leur confiance et leur soutien nos actionnaires ainsi que les nouveaux investisseurs institutionnels qui nous ont rejoints à cette occasion. Grace à cette levée de fonds, le groupe a désormais les moyens de finaliser sa transformation digitale, déjà bien engagée, au profit de ses clients et de ses actionnaires. Nous ouvrons ainsi une nouvelle page de notre histoire qui va nous permettre d’atteindre notre objectif de 75% de nos revenus sur internet en 2015 et d’accélérer le retour à la croissance ».
Le prix de souscription de 15 euros était jugé suffisamment attractif à la fois pour susciter l’engouement des investisseurs mais aussi pour les créanciers appelés à transformer une partie de leurs créances en actions.

Un an plus tard, la société encourageait d’ailleurs ses salariés à souscrire à une augmentation de capital sur la base d’un prix de souscription de 16.80 euros, considéré comme un avantage réservé aux salariés.
Or aujourd’hui l’objectif est quasiment atteint, l’EBITDA 2015 légèrement supérieur aux attentes, deux foyers de pertes cédés et la société a même pu réaliser, début janvier 2016, une petite acquisition stratégique.
D’où l’incompréhension quasi générale sur la non communication de la société en juin dernier quand un analyste, à l’opposé d’autres analystes tout aussi sérieux et crédibles, dévalorise significativement la société , ou quand l’annonce de l’annulation du PSE n’amène pas de réponse circonstanciée de la part de la société alors que le cours de bourse dégringole de façon vertigineuse en six mois pour se trouver divisé par trois et atteindre un niveau bas à moins de la moitié du prix de souscription de l’augmentation de capital de mars 2014. Il serait d’ailleurs instructif de connaitre les procès verbaux des réunions du conseil durant cette période et de savoir quelle a été votre propre position sur ce sujet. L’attitude de Solocal tranche singulièrement avec celle de Casino qui s’est trouvé dans la même situation.
Mais le summum de l’incompréhension est arrivé avec le communiqué accompagnant la publication des chiffres de l’exercice 2015. Le rédacteur du communiqué aurait voulu faire chuter le cours de bourse qu’il ne s’y serait pas pris autrement. L’incompréhension s’est transformée en indignation lorsque le lundi qui a suivi ces jeudi et vendredi « noirs » durant lesquels le titre a quasiment été divisé par deux, la société n’a pas cru bon de revoir sa communication pour mettre les chiffres en perspectives puisque comme me l’a écrit fort justement le Président Robert de Metz, « le cours est totalement déconnecté des chiffres réels ».
Aujourd’hui, près de cinq cent actionnaires se sont regroupés informellement et presque spontanément pour vous faire part de leur souci de vous voir agir loyalement à leur égard et en cohérence avec les opérations capitalistiques qui ont eu lieu depuis deux ans et les résultats obtenus.
Si comme l’a indiqué la directrice de communication dans un email adressé à un actionnaire, la société est en discussion avec des investisseurs, il ne serait pas compréhensible que le mandat donné au management par le conseil d’administration pour négocier l’arrivée d’un nouvel investisseur puisse se faire sur une valorisation de l’action à moins de 16.80 euros. Dans la mesure où plus de 80% du capital est réparti entre des « petits porteurs » et que, sauf erreur de ma part, aucun administrateur, au sein du conseil, ne représente un intérêt actionnarial significatif de quelques pour cent, il est d’autant plus important que vous exerciez votre mandat en prenant en compte l’intérêt des actionnaires qui sont en droit de vous demander des comptes en cas de dilution dans des conditions financières incohérentes avec les chiffres réels et les perspectives de la société.
Vous voudrez bien trouver ci-joint copie de la correspondance adressée à Monsieur Jean Pierre Rémy en tant que Directeur général de notre société et dont par ailleurs nous reconnaissons volontiers le travail effectué pour la transformation de la société vers le digital avec les résultats que l’on sait et que nombre de sociétés pourraient envier à Solocal.
J’adresse copie de ce courrier que par respect des formes je vous fais parvenir par lettre simple et par lettre AR – et je vous prie de ne pas vous en formaliser – au Secrétaire général de l’AMF ainsi qu’aux 477 actionnaires qui se sont fait connaitre et qui ont donné leur aval pour que ce courrier vous soit également envoyé en leur nom.

Veuillez agréer, Monsieur l’Administrateur, l’assurance de ma parfaite considération.

Baudoin de Pimodan

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